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18 octobre 2009 7 18 /10 /octobre /2009 17:10

Ce mardi 20 octobre, les 3 fédérations syndicales représentatives à la SNCF appellent à une journée de grève (cf. préavis CGT) concernant notamment la réforme du Fret. Je ne participerais pas à cette action, non que j’en désapprouve le motif, mais parce que je considère que la manière dont elle est organisée est contre-productive.

 

Le 16 septembre, la CGT appelait à un rassemblement au Bourget pour dénoncer la réforme du Fret, rassemblement organisé sans appel à la grève pour ce jour là. Au travail ce jour là, je n’ai pas pu m’y rendre ; mon cas ne devait pas être isolé puisque seulement 5000 cheminots (selon les estimations les plus optimistes) ont participé à ce rassemblement. Un nombre certes non-négligeable mais tout à fait insuffisant pour faire fléchir la direction.

 

Aujourd’hui, les trois organisations représentatives appellent à la grève, mais sans appeler à une manifestation. La seule visibilité de la grève sera donc le nombre de trains ne circulant pas et la frustration des usagers qui s’en suivra. Un cortège devant le siège de la SNCF aurait été un meilleur message.

 

Un jour, on appelle à une manifestation sans appeler à la grève, le jour suivant, on appelle à la grève sans appeler à manifester. Ce type de « mobilisation » divise les forces, cela épuise et décourage les militants syndicaux dans des mobilisations qu’on sait d’avance infructueuses.

Plus encore, cela ne peut pas conduire à établir un rapport de force favorable vis-à-vis de la direction. Au contraire, la faiblesse prévisible de ces deux mobilisations consécutives constituera bien plutôt une preuve que les syndicats ne sont pas dans la capacité de s’opposer aux réformes voulues par la direction. C’est « tendre le bâton pour se faire battre », c’est mettre les cheminots en difficulté.

 

Il en va de même de la journée de mobilisation interprofessionnelle du 22 octobre pour la défense de l’industrie. Les syndicats de cheminots ont fait le choix de se mobiliser sur leurs revendications propres deux jours avant la journée interprofessionnelle. Sans appel à la grève, on voit mal qui, à la SNCF comme dans les entreprises du secteur privé, se rendra à la manifestation du 22 octobre. On peut d’ores et déjà dire que ce sera un échec, et en tout les cas rien de comparable avec les grandes manifestations du printemps. Le gouvernement pourra prendre acte du fait que les syndicats sont dans l’incapacité de mobiliser aussi massivement qu’au printemps, qu’il a donc gagné l’épreuve de force et qu’il pourra continuer ses réformes.

 

En organisant la dispersion du mouvement syndical, en épuisant les militants les plus motivés dans des actions perdues d’avance, les syndicats font le jeu du patronat et du gouvernement. Pourquoi ? C’est un tout autre débat dont je n’ai pas la prétention d’avoir les clés ; le constat à lui seul est suffisamment amer.

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17 mars 2009 2 17 /03 /mars /2009 22:23

La crise est mondiale, certes. Les Etats sont-ils pour autant impuissants face à la crise ? Les grands groupes industriels et financiers sont-ils eux aussi impuissants ? Bien sûr que non. Une grève est-elle alors impuissante ? Je réponds non ! Elle peut influencer la politique économique des Etats, la stratégie des grands groupes industriels et financiers.

 

Je ferais grève le 19 mars pour influencer la politique française et au delà celle de l’UE pour que soient prises les mesures que je juge nécessaire face à la crise : relancer l’économie par la consommation et donc défendre les salaires et le pouvoir d’achat ; mettre fin aux licenciements boursiers qui ne bénéficient en rien à l’économie réelle ; mettre fin aux délocalisations et au dumping social.

 

Je ferais grève aussi pour faire pression sur le patronat, pour qu'il intègre dans sa stratégie économique que les futures délocalisations et restructurations motivées uniquement par l’appétit d’un gain boursier rencontreront une  forte résistance des salariés.

 

Je ferais grève en sachant aussi que ce n’est qu’une étape. La « lutte » dans la rue doit ensuite se poursuivre dans les urnes. Et notamment parce que les réponses à la crise devant être européennes, la poursuite de ce mouvement sera de voter le 7 juin pour des députés européens qui porteront politiquement les valeurs défendues par les salariés dans la rue ce 19 mars.

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21 février 2009 6 21 /02 /février /2009 12:51

En métropole, un mouvement social de grande ampleur s’organise progressivement : grève interprofessionnelle du 29 janvier fortement suivie, appel à une nouvelle journée de grève le 19 mars, maintien – exceptionnel – dans la durée de l’unité syndicale. Ce mouvement est axé sur le pouvoir d’achat, les salaires, l’emploi. Des revendications très proches de celles des mouvements dans les DOM, Guadeloupe, Martinique et sans doute prochainement Réunion et Guyane.

Le niveau et la durée de la mobilisation, mais aussi – hélas – l’irruption de la violence peuvent nous interroger : quelles sont les différences entre la métropole et l’outre-mer à l’origine des formes différentes de mouvements sociaux aux revendications similaires, et surtout pourquoi certains en arrivent à recourir à la violence ? 

Dans mon expérience, la violence purement gratuite et aveugle est souvent individuelle. Lorsqu’elle devient collective, sous la forme d’émeutes, elle n’est que rarement le produit de la bêtise humaine mais bien plus souvent l’expression d’un désespoir. C’est ainsi, je crois, qu’il faut analyser les violences que connaît la Guadeloupe. La profondeur du désespoir, c'est-à-dire le niveau de misère et l’absence de perspectives d’avenir, c’est ce que je vais tenter d’esquisser ici sobrement, par quelques chiffres et statistiques.

 

En chiffre et en bref :

Taux de chômage [1] :

Ø              Réunion : 25.1%

Ø              Guadeloupe 25.0%

Ø              Martinique : 22.1%

Ø              Guyane : 21.0%

RMI [2]:

Ø              8% de RMIstes vivent dans les DOM

Ø              2% des actifs vivent dans les DOM

Salaire mensuel net moyen [3]

Ensemble de la population :

Ø              Métropole : 1 942 €/mois

Ø              Guadeloupe 1 771 €/mois,

Cadre :

Ø              Métropole : 3 851 €/mois

Ø              Guadeloupe 3 881 €/mois,

Ouvriers :

Ø   Métropole : 1 423 €/mois,

Ø              Guadeloupe : 1 338 €/mois.

Prix des denrées alimentaires [4]

Pâtes :

Ø              Paris : 0,9 € / kg

Ø              Province : 0,84 € / kg

Ø              Guadeloupe : 1.85 € / kg

Lait

Ø              Paris : 5.19 € / 6 L.

Ø              Province : 5.52 € / 6 L.

Ø              Guadeloupe : 8.58 € / 6 l.


La crise sociale, c’est d’abord le chômage. Les 4 départements d’outre-mer sont tout simplement les 4 régions  de l’UE connaissant le plus fort taux de chômage [1]. Viennent ensuite Ceuta et Mellila, les deux enclaves espagnoles au Maghreb, et seulement après les régions désindustrialisées de l’ex-Allemagne de l’est, les anciens pays d’Europe de l’Est. Ce chômage touche tout particulièrement les jeunes, autour de 50% en Guadeloupe. De même, il y a proportionnellement 4 fois plus de RMIstes dans les DOM qu’en métropole[2]. Ces chiffres sont la preuve de difficultés sociales importantes dans ces territoires. Mais au-delà, que les six régions d’Europe les plus touchées par le chômage soient toutes situées outre-mer ne peut-être un hasard. Est-ce dû au relatif isolement de ces territoires ? Trois d’entre eux sont certes des îles, mais ce n’est ni le cas de la Guyanne, ni de Ceuta ni de Mellila. Malte est plus isolée que Ceuta et Mellila, sans connaître les mêmes difficultés. Est-ce dû à des caractéristiques culturelles ? Mais hormis d’être des cultures métissées et pas seulement d’origine purement européenne, qu’y a-t-il de commun entre la Guadeloupe, la Réunion et Mellila ? Est-ce alors dû à des comportements « néo-coloniaux » des états : sous investissements, désintéressement de l’état, cette piste mérite au moins d’être étudiée.  

A un très fort taux de chômage s’ajoute également la question du pouvoir d’achat des salariés. Le salaire mensuel moyen est inférieur de 9% en Guadeloupe par rapport à celui de la métropole. Alors que les cadres et professions libérales touchent des salaires équivalent voir supérieurs à ceux de métropole, les différences de salaires se font principalement sentir chez les ouvriers[3]. Cette inégalité économique se double d’un ressentiment social. La majorité des guadeloupéens – pour la plupart « noirs » - ressent une discrimination raciale en Guadeloupe et en Martinique : Les « békés », descendants des grandes familles d’anciens colons et esclavagistes européennes, détenteurs de fortunes héritées du passé colonial auraient conservés la possession de la majorité des entreprises, des commerces et des terres. La loi française n’autorise aucune statistique ethnique pour le prouver. Mais, en d’autres lieux, par exemple en Amérique Latine, en Bolivie, au Brésil et ailleurs, ce même phénomène existe. Pourquoi la Guadeloupe y aurait échappé ? Il serait à minima hypocrite de prétendre que les DOM seraient exempts, pour les accès aux emplois les plus élevés, de la discrimination à l’embauche maintes fois mise en évidence par la HALDE ou par des associations de luttes contre le racisme en métropole.

Au chômage pour les uns, aux bas salaires pour les autres, il faut ajouter le « coût de la vie ». Les prix, notamment des denrées alimentaires, sont très supérieurs à ceux de métropole, de 50%, parfois même le double[4]… Le coût du transport et les taxes spécifiques à l’outre-mer suffisent-elles à expliquer ces différences de prix ? Il est permis d’en douter. Sans être économiste, on peut se faire quelques remarques : à l’heure de la mondialisation, combien de denrées dans les grandes surfaces de métropole y sont effectivement produites et ne connaissent de surcoûts ni en droits de douanes, ni en frais de transport ? Le riz Basmati de Thaïlande n’est pas plus cher que le Riz Taureau Ailé Long Grain de Camargue, ce serait même l’inverse… On peut aussi se demander pourquoi les tomates d’Espagne sont un produit de luxe dans les grandes surfaces antillaises et la banane antillaise un produit bon marché en métropole ? Le coût du transport est pourtant le même… Cela rend donc au moins audible l’explication du LKP (collectif d’associations, syndicats et partis politiques à l’origine du mouvement en Guadeloupe) : le faible nombre d’acteurs dans le domaine de la grande distribution rend possible une entente sur les prix, au détriment du consommateur.

Ces quelques chiffres permettent de se figurer l’ampleur de la crise sociale et économique qui touche les DOM et particulièrement la Guadeloupe. Ils permettent de comprendre qu’un mouvement social largement suivi exige des réponses, des investissements et des aides de la part de l’état, une contribution à l’effort collectif de la part du patronat. Quelle que soit l’origine des difficultés qui frappent l’outre-mer, le devoir d’égalité, d’équité et de fraternité entre tous les citoyens français fait qu’on ne peut se satisfaire de la réponse : « c’est une spécificité de l’outre-mer, on n’y peut rien » ou encore « s’ils étaient indépendants, ce serait pire ». Si la Creuse était indépendante, elle aussi connaîtrait une situation plus difficile que n’est la sienne aujourd’hui. Cela dispense-t-il l’Etat de veiller à la péréquation et à l’aménagement du territoire, de tout le territoire, DOM-TOM compris ? Evidemment non.

Ces chiffres permettront peut-être aussi de comprendre le niveau de désespoir de la jeunesse de ces régions. A l’automne 2005 en France, à l’hiver 2008 en Grèce, chacun a pu voir à quelles extrémités peut être conduite une jeunesse qui a perdu l’espoir en un avenir meilleur et perdu la confiance en ses dirigeants politiques,qui se sent rejetée et discriminée. La désillusion de la jeunesse française d’outre-mer est infiniment plus grande, et sa réaction potentiellement infiniment plus violente. Le pire peut-être, serait que cette crise sociale prenne la forme de violences communautaires, de violences racistes attisées par les blessures mal cicatrisées du souvenir du passé colonial.

A cette crise d’une très grande gravité, il était du devoir de l’Etat d’apporter des réponses. Celles proposées par le LKP ou d’autres, issues de sa propre analyse. Il n’en a rien fait, ou si peu. Là est sa faute dans la poursuite et  l’enlisement du mouvement. Là est sa responsabilité morale dans la transformation en émeutes urbaines de ce qui était au départ seulement un conflit social.



[4] Blog du collectif Gauche-Alternative Sambre-Avesnois. Il n’existe aucune statistique officielle correspondante.

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9 février 2009 1 09 /02 /février /2009 09:57

 Le 29 janvier, en métropole, plusieurs millions de salariés ont participé à une grève interprofessionnelle, deux millions d’entre eux étaient dans la rue. La Guadeloupe était plongée depuis deux semaines déjà dans une grève générale. Ils ont été rejoint depuis par la Martinique. Les deux mouvements exigent des mesures concrètes de l’état en faveur des salariés.

 

La réponse de Sarkozy, ce fut un « nouveau » cadeau au patronat : la suppression de la taxe professionnelle. « Nouveau » le cadeau ne l’est pas tant, la réforme de la taxe professionnelle étant dans les « tuyeaux » depuis longtemps. C’est bien pourquoi on peut dire cavalièrement que Sarkozy se « fout » de nous.

 

Il existe déjà des espaces, notamment la commission Balladur sur la réforme des collectivités territoriales pour débattre d’une indispensable réforme de la fiscalité locale, et notamment du destin de la taxe professionnelle. L’annoncer lors de son intervention télévisée est donc purement symbolique : le jour où les salariés attendent des mesures en faveur de l’emploi et des salaires, il fallait annoncer une réforme en faveur du patronat !

 

Alors oui, Sarkozy peut bien « enrober », cela d’un gros milliards de mesures sociales, présenté très habilement comme financé par les intérêts de l’argent prêté aux banques. Il n’en reste que tout le monde aura retenu la leçon : vous réclamez des mesures pour l’emploi et les salaires ? je donne plus aux patrons. Quant à ceux qui réclament loin, au-delà des mers, je les ignore purement et simplement.

 

Alors oui, il se « fout » de nous.

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2 février 2009 1 02 /02 /février /2009 14:46

  Lors de la manifestation du 29 janvier, il était frappant de remarquer le nombre de secteurs en grève, chacun avec ses propres revendications. Ici, la Protection Judiciaire de la Jeunesse portant des mots d’ordres sur la réforme de l’ordonnance des mineurs de 1945, là les intermittents du spectacle à propos de l’indemnisation du chômage, plus loin des infirmières et la réduction des postes dans les hôpitaux, des enseignants, des chercheurs, des ouvriers de Renault, de la grande distribution… Mais pourquoi tous ses secteurs sont venus en nombre à une manifestation unitaire si chacun a des mots d’ordres différents qui ne peuvent qu’être noyés dans la masse ?

 

 Plus généralement, la manifestation fut majoritairement ressentit comme étant un mouvement contre la politique du gouvernement. L’appel interprofessionnel des syndicats était d’ailleurs assortit d’un contre-plan de relance.  La manifestation était donc bien une manifestation d’ordre politique, pourtant ce sont les syndicats, et ce de manière unanime, et non les partis de gauche qui y ont appelé. Pourquoi donc les syndicats ont investis le champ politique ?

 

Le plan de relance est vécu comme étant un cadeau aux actionnaires, aux grands patrons, au monde de la finance, au détriment du maintient des salaires, du pouvoir d’achat. On parle de « deux poids, deux mesures », de plan à « deux vitesses ». Bref, d’un plan fait au profit d’une classe sociale et aux dépends d’une autre.  La première vivant des revenus du capital (dividendes, vente d’actions, stock option et autres produits de la bourse  et du monde de la finance), la seconde vivant des revenus de son salaire.

 

 Deux classes sociales, le capital et les revenus du travail, sans prononcer le mot, on en revient à une vieille idée : la « lutte des classes », sous sa forme du XXIème siècle, mais lutte des classes quand même. Si parmi les manifestants, on trouvait du cadre moyen syndiqué à la CGC (Confédération Général des Cadres) au technicien spécialisé syndiqué chez Sud, c’est parceque nous avons tous ceci en commun : être des salariés.

 

Et si on en revient à la lutte des classes, à qui revient-il d’organiser le mouvement, si ce n’est aux organisations spécifiques des salariés,  les syndicats ?

 

C’est un phénomène nouveau, en rupture avec le rôle traditionnel des syndicats et des partis politiques en France depuis l’après-guerre. Cela explique sans doute les tâtonnements et les hésitations pour donner une suite à ce mouvement d’une ampleur remarquable. Qui doit prendre le relais ?

Un débouché politique dans les urnes n’est pas une translation évidente d’un mouvement à l’origine syndical. Et ceci est d’autant plus compliqué que si la gauche est en pleine mutation (tentative de constituer un Front de Gauche LCR-PCF-PG, réorientation du PS par Martine Aubry), pour l’heure celle-ci ne semble pas être en mesure d’être une force convaincante et crédible pour une alternative politique.

Une lutte syndicale dans la durée sur un thème aussi politique est hors du cadre habituel du syndicalisme et est conceptuellement difficile à imaginer. Et pourtant… c’est ce qui s’est fait en Amérique Latine, c’est aussi d’une certaine manière ce qui se passe aujourd’hui même dans un coin de France qui n’est que peu sous l’œil des caméras : la Guadeloupe.

Alors, quelle suite à donner au 29 ? Je suis bien en peine de le dire. Comme d’autres, j’aimerais un mouvement social fort, une grève générale porteuse de grands changements. La manifestation du 29 était le premier pas dans cette direction, mais le chemin pour y parvenir est encore long. Sera-t-il parcouru, je le souhaite, sans oser y croire.

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